Ma voix en suspens.
Je fais entendre ma voix, et sa portée est mondiale. Un
ordinateur connecté à un modem ou un smartphone, un site où poster mes propos
et me voici diffusée et consultable partout. Mon avis, mes pensées, mes
problèmes : je peux tout écrire, tout dire, tant que je ne diffame ou n’insulte
quelqu’un.
Si mon pays me brime, je peux évacuer ici, sur ce nouvel
état qui fait si peur aux Etats : l’Internet. L’Internet est un pays de
libre-pensée, consacré aux échanges entre citoyens de toute la planète, sans
aucun délai. En gros, j’éternue, et on le sait en Chine juste dans le délai qu’il
me faut pour l’écrire et le diffuser.
Bien sûr qu’il y a de quoi effrayer nos Etats ! Là où
il y a quelque temps on pouvait opprimer les masses et cacher ses forfaits, les
grondements sourds des peuples se font maintenant entendre et se propagent à la
vitesse des mégabits par seconde.
Mon Etat de liberté devient de moins en moins libre. Plus le
temps passe et plus je dois faire attention à moi. Ne pas laisser de traces, ne
pas me faire plumer, voici mon enjeu quotidien. Non pas que je sois une hors la
loi, non : mais bientôt, le simple fait de m’exprimer sera-t-il estimé
trop dangereux par d’aucuns ? Ces mêmes d’aucuns qui souhaitent conserver
une trace de tout ce que je fais, de ce que j’achète, qui j’appelle, qui je
vois, où je vais, ceux qui me filment à mon insu et m’écoutent quand j’écris
(potentiellement) ?
L’Etat policier est en marche et il semble assez illusoire
que nous puissions faire quoi que ce soit pour enrayer le mouvement amorcé.
Nous aurions dû réagir plus tôt, lorsque c’était encore possible et que les
potentialités n’étaient pas aussi visibles. Maintenant, « ils » ont
peur de nous et « ils » ont sans doute raison d’avoir peur. Nul doute
qu’ « ils » trouveront un jour les moyens et ressources nécessaires
pour nous museler. D’ailleurs, ça a déjà commencé, mais tout comme « ils »
ne l’avaient pas vu pour la portée de notre voix, en son temps, nous sommes à
présent tout aussi aveugles.
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